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L’éthique du progrès

Monde d’après : redonner un prix au travail

En 2016, le salaire brut moyen mensuel était en France de 3 021 euros, soit moins de la moitié de celui de la Norvège ou de la Suisse. Ce constat statistique à l’échelle de l’Europe, et qui ne reflète pas la réalité salariale française [1], consacre l’impossibilité de penser le monde par le biais des fruits du travail, le salaire. Dans ce domaine-ci comme dans beaucoup d’autres, le modèle de la globalisation est défaillant et met à priori en échec toute pensée du monde d’après.

Ce qui est important de relever dans ce constat c’est que la particularité géographique, culturelle, sociale, économique et politique des pays est toujours mise en avant par les pays eux-même pour justifier ces disparités salariales mais, dans le même temps aucun d’eux ne fait cas de cette même disparité quand il s’agit encourager la globalisation des marchés et des échanges, la circulation de la main d’oeuvre et la vente des biens et services partout dans le monde au prix le plus bas, et si possible identique.
Il y a donc là un paradoxe qui nous interdit de penser un monde du travail globalisé, l’idée d’un marché mondial du travail et d’une justice salariale. D’ailleurs des organisations comme l’Organisation internationale du travail (OIT) ne trouvent justification à leur existence que dans cette difficulté : la disparité mondiale des normes de travail, incluant les salaires.

Démondialiser le salaire - mondialiser le prix du travail

Ce qui est donc mis en cause ici c’est l’inégalité du prix du travail et les bas salaires, outils d’uniformisation à la baisse des prix des biens et services vendus partout dans le monde. On voit la tension. Il ne s’agit pas de rejeter la diversité des pays et des cultures mais en matière de prix du travail de lui trouver une équité, une équité qui passe par le retour au local, au circuit court et au consommé sur place, à ce qui est propre à chaque pays. C’est ce retour au local qui oblige à repenser le prix du travail. La mondialisation, elle, le décrète toujours au plus bas.

Il existe aujourd’hui de très nombreuses expériences de productions et de commerce équitables, ainsi que de nombreuses expériences de mise en place de monnaies locales alternatives. Mais le défi qui se pose à nous, ne se trouve pas limité au secteur artisanal qu’il soit marchand, agricole voire même industrieux. En France, comme ailleurs, nous voyons déjà apparaitre de plus en plus « de clusters », désolé le mot est à la mode, très souvent artisanaux et agricoles, où le prix du travail retrouve un niveau qui donne aux hommes et aux femmes les moyens de la subsistance, de l’émancipation et de la participation à la vie sociale.
Non le défi d’aujourd’hui se trouve dans les secteurs plus industriels de la production de biens et de services et pour les catégories sociales des employés, ouvriers, et cadres moyens, sans oublier les apprentis et les stagiaires.

Repenser la structure du salaire

Le prix du travail est le prix de la dignité de l’homme. Si on ne peut pas l’uniformiser en tant que tel à l’échelle du monde, ce que l’on peut penser à l’échelle de la planète c’est l’uniformisation de sa composition en créant un système où un barème incluant au salaire une part fixe (en monnaie) et une part variable (en monnaie ou en service). Ce faisant, on pourrait peut-être calquer notre idée sur le système financier des contrats d’assurance-vie. Cela donnerait à la composition mondiale du prix des salaires, une part monétaire et une part en « unité de compte », c’est à dire un fixe, plus un intéressement au résultat de l’entreprise (ce que l’on connait déjà mais que l’on met difficilement en place), ou bien encore aux produits de l’entreprise, ou même encore par une rémunération en monnaie alternative ayant cours dans le pays.

Même si cet aspect du "monde d’après", trop vite dit ou écrit (ce qui est le cas),peut apparaître très utopique, il le serait à ceci près que le crédit, les actions en bourse, l’assurance-vie, le travail de l’argent en général fonctionne tous les jours en part fixe et variable, en part de capital et en intérêt. Aussi dans cette réflexion sur le prix du salaire, je ne vois pas en quoi l’homme ne serait pas digne d’intérêts et capital dans la marche du monde, et de son économie.

Notes

[1Même si le salaire brut mensuel moyen a passé pour la première fois la barre des 3 000 euros, à 3 021 euros en 2016, bien évidemment il varie selon les catégories socioprofessionnelles : allant de 2 108 euros par mois (+0,1%) chez les employés (les ouvriers touchent eux en moyenne 2.220 €) à 5 470 euros chez les cadres (+0,8%).
Cette échelle de salaire se retrouve aussi dans le salaire net moyen en France. Le salaire des cadres (y compris les chefs d’entreprise salariés) atteint en moyenne 4 060 euros net quand les employés doivent en moyenne se contenter de 1 590 euros net en 2016.
Ave ces chiffres France occupe ainsi la 20ème place dans le classement mondial de l’ONU. Le salaire brut moyen mensuel y est exprimé en USD ; ce qui donne pour la France 3226, 7 $ bien loin derrière les deux premiers, la Norvège et la Suisse, où il est respectivement de 6865,8 $ et 6770 $. On se rassure comme on peut : le salaire brut moyen en Allemagne était en 2016 de 3661,7$. La différence de rémunération des hommes et des femmes est la règle partout dans le monde. Cependant dans les pays du Nord de l’Europe elle est très souvent bien inférieure à 10 % quand en France elle frôle les 20 % (19 % en 2016).

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