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La transition écologique

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Entreprendre en MWh

Aujourd’hui, chacun peut réellement envisager de trouver dans la transition énergétique, sa propre subsistance énergétique par l’autosuffisance, le partage avec les smart-grid et donc un épanouissement économique, social, intellectuel et moral.

Le constat

L’énergie renouvelable l’air, l’eau, le soleil, la biomasse sont des biens communs accessibles à toute l’humanité à la différence des énergies fossiles et fissiles. En cela elles sont un capital disponible et attribué à chaque humain.
L’énergie est pour l’économie le premier facteur de croissance. Le charbon, le pétrole, le gaz et plus récemment le nucléaire, ont accompagné développé et façonné notre économie. Pourtant, plus nous avançons dans notre histoire plus nous voyons que la dépendance énergétique aux énergies fossiles et fissiles est un facteur de crise sociale, environnementale et économique et a entrainé sans cesse l’humanité vers de nombreux conflits.
La disparition progressive des monopoles d’Etat, la rend plus que jamais aujourd’hui un modèle d’aliénation de l’homme par l’homme appuyé sur une logique de croissance et non plus de progrès. L’homme, le consommateur prend douloureusement conscience de cette aliénation dans la précarité énergétique et de manière forcée avec les hausses imposées des prix de l’énergie, des prix à la consommation, des prix des carburants.
En réaction, ces 20 dernières années, de plus en plus de consommateurs sont devenus plus vigilants et plus responsables. La minorité agissante des années 70 est devenue une majorité grandissante de citoyens responsables et entrepreneurs qui ont la volonté de faire quelque chose de nouveau. Dans cette prise de conscience, ils se disent « on doit faire quelque chose dans le transport, l’eau, l’énergie » avec la volonté d’utiliser les ressources et d’inventer des solutions locales. Ils renouent ainsi avec le progrès scientifique et humain sans préoccupation de la croissance économique.
C’est pourquoi ils se tournent naturellement vers les énergies renouvelables qui par leurs origines et leur accessibilité, viennent naturellement contrebalancer les monopoles des énergies fossiles et fissiles en redonnant une place à l’homme et à son environnement grâce à l’autoconsommation des énergies naturelles qui sont offertes à tous, le soleil, l’air, l’eau, la biomasse et les produits de son activité tels les déchets.
Ainsi, une partie des énergies renouvelables, on pense ici essentiellement au photovoltaïque, a commencé à être produite et consommée directement par les usagers pour couvrir une partie de leur consommation ou pour revendre l’énergie produite en surplus ; Aujourd’hui, les consommateurs résidentiels, mais aussi certains clients du secteur tertiaire (grandes surfaces commerciales, bâtiments agricoles, hôpitaux, etc.) investissant eux-mêmes dans leurs unités de production décentralisées. L’implication de ces clients finaux est moins forte dans l’éolien terrestre, qui se prête moins à une implantation au plus près des lieux de consommation, compte tenu de la taille des installations et de l’espace nécessaire à leur fonctionnement.

L’idéal de l’autoconsommation
En France le combat militant pour l’autoconsommation est mené par la filière photovoltaïque qui y a trouvé un second souffle. Elle en est devenue le chef de file car la France est toujours indécise sur l’autoconsommation de renouvelables. Contrairement à l’Allemagne, les pouvoirs publics français n’ont pas encore décidé du cadre réglementaire ou s’apprêtent à le faire dans le cadre de la loi de programmation sur la transition énergétique.
De leur côté les industriels des renouvelables appellent à une expérimentation maîtrisée. On le comprend mieux à la lecture de quelques récents sondages à l’initiative de l’association Partnair’Enr, qui s’investit dans le soutien au secteur des énergies renouvelables et plus particulièrement du photovoltaïque et de l’énergie solaire. Ses sondages montrent que si une majorité de français souhaiteraient cultiver les légumes qu’ils consomment, ils sont tout autant à vouloir produire l’énergie qu’ils utilisent. En fonction de leurs catégories sociales et de leur zone géographique ils seraient jusqu’à 88 % à le souhaiter.
L’un des principaux enjeux du développement de l’autoconsommation de l’électricité photovoltaïque et de toute source renouvelable est l’incertitude relative au rôle futur du réseau électrique de distribution et à son financement. Le ministère de l’écologie qui "souhaite l’accompagner" a établi un groupe technique sur le sujet et au sein duquel il semble bien que solution qui tend à se dégager soit celle d’un réseau de distribution et de collecte dont le financement, à l’avenir, ne seraient plus supporté par les seuls consommateurs mais par l’ensemble des citoyens au titre d’un bien commun. Une approche qui anticipe la création des smart-grids et leur rôle spécifique de réseau de distribution et de collecte.

Vers un entreprenariat éthique énergétique
Cette volonté d’autoconsommation et donc d’autoproduction conduit à réfléchir sur de nouvelles formes d’entreprenariat énergétique plus éthique de manière à ne pas renouer avec les difficultés récentes de la filière photovoltaïque. Elles devront inciter plus fortement à l’accompagnement par les citoyens eux-mêmes de la Transition Energétique annoncée, de leur transition écologique et énergétique. L’histoire actuelle en donne l’opportunité,

Pouvoir entreprendre en Mégawatts/h et non plus en Euros.
Toute forme d’entreprenariat intervenant dans le champ de l’autoconsommation énergétique (production-consommation) devrait voir son capital et son activité exprimée en MWh, le MWh étant convertible en Euros. C’est là le fondement de la production et de l’autoconsommation éthique énergétique à base d’énergie renouvelable qui repose sur le principe fondamental que l’eau, l’air et le soleil forment un capital naturel et renouvelable d’énergie attaché à chaque être humain, ces sources d’énergie renouvelable sont donc inaliénables à ceux qui veulent les utiliser.
Dans cette idée l’ensoleillement, le régime des vents, la force de l’eau deviennent la base de calcul pour la constitution d’un capital et l’expression de l’activité de toute entreprise de production d’énergie à partir de l’une de ces sources.
Prenons ainsi l’exemple d’une famille vivant en France et bénéficiant de 200 jours d’ensoleillement et d’une installation de 100 m2 de panneaux solaires. La puissance nominale de l’installation combinée à l’ensoleillement forme un capital annuel en MWh qui devient leur capital d’autoconsommation, celui de leur entreprise de production d’énergie. Le calcul sera le même pour les régimes des vents et la puissance de l’éolienne, pour la puissance du courant et celle d’une turbine.

Les cadres juridiques pour entreprendre en MWh
Le cadre juridique à un tel entreprenariat se développe déjà aujourd’hui au travers de la mutualisation de moyens de production d’énergie renouvelable (SCOP, SCIC), mais il n’a pas encore été établi un cadre économique et social propre et pertinent à l’autoconsommation. Ce cadre a été recherché dans la préparation de la loi de programmation de la transition énergétique.
Trois formes d’entreprenariat seraient adaptées à ce que l’on considère aujourd’hui comme les unités de base de l’autoconsommation énergétique : le tertiaire (bâtiment), l’industrie (usine), l’habitat (pavillons, immeubles), l’agglomération urbaine (quartiers).

Ces formes d’entreprenariat emprunteraient des formes juridiques connues :

  • Une Société de Production d’Energie Renouvelable (Eurl, Sarl).
  • Une Société Coopérative de Production d’Energie Renouvelable (SCOP/SCIC).
  • Une association loi 1901 de Production d’Energie Renouvelable.

Chaque entité créée est un producteur-autoconsommateur, qui remet son surplus de production dans le réseau.
Le capital exprimé en MWh conserve les mêmes vertus économiques qu’un capital exprimé en Euros. Il amène peu de modifications dans le fonctionnement de ces formes de sociétés (fiscalité, droit civil et droit des sociétés), mais s’apparente au mode de gestion désintéressée des associations loi 1901 et de l’économie sociale et solidaire.
Cette idée pourrait être d’abord expérimentée au travers de start-up et aux particuliers avant d’être proposée et étendue aux opérateurs existants.

Principales caractéristiques et principaux arguments en faveur d’une nouvelle économie de l’énergie exprimée en MWh

  • Un capital initial exprimé en MWh est lié à la puissance nominale de l’installation où lors de la constitution, chaque part représente la consommation du ou des associés. Il n’est pas cessible en €.
  • La valeur en € du capital exprimé en MWh est calculée sur la base du prix de vente de l’électricité au consommateur. Elle échappe ainsi aux fluctuations du marché de la production d’électricité et aux variations du tarif de rachat. Cette évaluation sert aux besoins en financements pour la maintenance ou le renouvellement des équipements.
  • La valeur de la part augmente au prorata de la baisse de consommation du porteur. Le surplus de production constaté à la fin de l’exercice social est analysé sous deux aspects :
    -  la sobriété qui permet d’augmenter la valeur des parts sociales et donc le capital,
    -  la performance (due aux bonnes conditions de production (climat, bonne gestion et entretien de l’installation) qui constitue les réserves.
  • Un MWh produit en surplus est convertible en € et peut être mis en épargne dans les dispositifs actuels et futurs de « l’épargne verte ».
  • L’entrepreneur disposant d’un capital MWh peut accéder prioritairement aux financements actuels et futurs dévolus au Développement Durable et aux EnR, octroyés par les pouvoirs publics et les banques.
  • Le capital exprimé en MWh rend lisible au gestionnaire du réseau le potentiel d’énergie disponible.
  • Le capital exprimé en MWh conduit à calculer au plus juste les installations et l’investissement nécessaire.
  • Le capital exprimé en MWh permet de prévoir par avance le delta entre consommation et surplus de production remis dans le réseau.
  • L’activité exprimée en MWh modifie le plan comptable ou crée des règles de comptabilité spécifiques au Développement Durable.
  • Le capital exprimé en MWh contribue à l’émergence d’une fiscalité comportementale ou à orientation écologique qui récompense les bons comportements. Une fiscalité incitative, financièrement transparente qui est basée sur la compensation d’avoirs et de créances (voir ma note sur la fiscalité écologique). Ainsi, sans être fiscalisé, un surplus de production peut être provisionné en MWh sous forme d’avoir chez le producteur (EDF, Direct énergie, ….), réutilisable par l’auto consommateur dans un pic de consommation futur ou pour palier des conditions de production climatiques et météorologiques défavorables.
  • L’activité exprimée en MWh modifie ou crée des règles fiscales spécifiques à cet entreprenariat en taxant le producteur uniquement sur les taxes liées à la fourniture d’électricité (CSPE, TFCE). La TVA est à 5,5 %. Par contre tout surplus converti en € dans une transaction commerciale de rachat d’électricité entre dans le champ de la fiscalité classique.
  • L’activité exprimée en MWh ouvre à une multitude de solidarités entre les zones sèches, peu ensoleillées ou peu ventées et celles qui le sont outrageusement. Dans cette idée une victime de sécheresse pourrait retirer d’un ensoleillement exceptionnel bénéfique à la production mais préjudiciable à ses conditions de vie (canicule-sécheresse), une compensation de sa situation. L’instauration d’un tel capital devient donc simultanément un instrument supplémentaire à la mesure de la déréglementation climatique et un outil d’atténuation et de compensation de ses effets économiques et sociaux négatifs.
  • L’activité exprimée en MWh permettrait à l’entrepreneur de faire des dons à des fonds de solidarité énergétiques en MWh pour les personnes en précarité énergétique.
  • L’activité exprimée en MWh favorise l’émergence d’une économie faiblement carbonée et bénéfique pour l’environnement.
  • Ce changement de paradigme économique de la production d’énergie avec une activité directement exprimée en MWh et non plus en Euros est aussi un formidable moteur à l’innovation qu’elle soit technologique ou sociale.

Texte écrit en mars 2014

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